Enpi

Travail sur deux phases du kata avancé Enpi

Le kata Enpi est fréquemment présenté lors des compétitions régionales, nationales ou internationales. C'est un kata court, tonique et rythmé, qui permet souvent de mettre en confiance les karatékas. Le saut se trouvant à la fin du kata, il est possible de gérer l'explosivité jusqu'au bout sans pour autant s'épuiser.

Pourtant en termes d'appuis, de rotations et de souffle, il s'agit d'un kata complexe à travers lequel s'expriment bien les différences entre les préférences motrices. L'analyse proposée portera sur les deux premiers mouvements du kata ainsi que sur les variantes autour des sukui uke.

1. Les premiers mouvements : descendre ou tomber ?

Marche par le Bas et Marche par le Haut

Les profils moteurs Bleu et Vert ont une préférence pour la Marche par le Bas. Cela signifie qu'ils préfèrent charger le poids sur leurs jambes pour agir. Cela a pour effet qu'ils gardent le contrôle de leur corps pour lutter contre la gravité depuis le bas. Au début du kata Enpi, ces deux profils ont tendance à descendre sur leurs jambes en fléchissant jusqu'à la position basse pour ensuite pousser afin de remonter.

Les profils moteurs Rouge et Jaune ont une préférence pour la Marche par le Haut. Cela implique la recherche d'un déséquilibre en haut permettant d'agir en se réorganisant en bas. Concrètement, ils amorcent leur premier mouvement en se laissant tomber jusqu'à la position basse et utilisent la percussion, l'impact, pour rebondir, comme s'ils étaient montés sur ressort, et remonter.

Point Mobile et Appuis

La Marche détermine la façon d'engager le mouvement. Le Point Mobile permet de préciser d'où part ce mouvement et a des implications directes sur le positionnement des pieds, du bassin et des épaules. Les appuis sont donc différents selon les préférences motrices.

Les profils moteurs Rouge et Bleu ayant un Point Mobile Haut ont tendance à dissocier les épaules du bassin. Le travail se fait principalement au niveau des épaules, avant de s'exercer dans la rotation du bassin. Leurs pieds peuvent être décalés. Le Rouge prend appui sur la gauche, alors que le Bleu essaie de conserver un appui centré.

Les profils moteurs Jaune et Vert ayant un Point Mobile Bas préfèrent garder un alignement bassin/épaules, maintenant ainsi leur tronc comme un bloc uni qui pivote selon les rotations des hanches. Leurs pieds restent le plus souvent parallèles. Le Jaune prend appui sur la droite, alors que le Vert essaie de conserver un appui centré.

La Respiration

Ce dernier paramètre influe sur l'explosivité de la technique. Les profils Bleu et Jaune sont plus efficaces s'ils agissent sur une phase d'inspiration tandis que les profils Vert et Rouge gagnent en explosivité s'ils sont en train d'expirer avant de commencer l'action.

2. Passer aux sukui uke : variantes et préférences motrices.

Dans les clubs, lors des compétitions, ou sur des vidéos, on observe régulièrement des différences dans le passage à la série des sukui uke. Il existe plusieurs variantes intéressantes à exploiter au regard des préférences de motricité.

La version "traditionnelle", présentée notamment par Maître Kanazawa dans la vidéo jointe, permet de prendre appui sur le pied gauche, ce qui correspond aux besoins moteurs des Rouge. Cette variante peut aussi être utilisée par les Bleu à condition qu'ils équilibrent le poids sur les deux pieds.

La version "moderne", c'est-à-dire celle que l'on rencontre plus fréquemment de nos jours et qui correspond à ce que Luca Valdesi applique dans la vidéo jointe, convient bien aux besoins moteurs des Jaune, puisque le poids est transféré sur le pied droit et que les pieds restent parallèles. Les Vert peuvent aussi l'utiliser s'ils équilibrent la répartition du poids sur les deux pieds, jusqu'à adapter leur position comme le fait la talentueuse petite fille japonaise dans la vidéo.

Enfin cette version "moderne" est une variante qui a l'avantage de favoriser l'expression des préférences de chacun dans la mesure où les profils Rouge et Bleu, qui aiment les appuis obliques, peuvent eux aussi s'approprier ce mouvement en jouant sur le placement des pieds. La vidéo de Frédéric Namèche en est l'illustration. Chaque karatéka peut ainsi réfléchir à la position et au mouvement qui lui conviennent le mieux dans cette phase de récupération qui conduit au saut.

Les variantes des katas sont donc d'intéressants exemples du rôle des motricités dans l'expression de soi, et on peut même affirmer que ces variantes existent en raison des différences de préférences motrices, au même titre que les styles de karaté qui se sont développés à partir du travail que les grands maîtres effectuaient sur eux-mêmes pour trouver leur voie, leur karaté.

L'Approche ActionTypes® met en évidence l'aspect capital de ces détails et nous amène à nous interroger sur nos propres pratiques : l'enseignant devrait être capable de proposer plusieurs pistes à ses élèves ; l'élève devrait être capable de choisir celle qui lui permet le mieux de "passer au niveau supérieur" en favorisant l'expression de ses préférences.

Nota Bene : Ce document n'est que la présentation de quelques réflexions issues de l'analyse du kata Enpi. Si vous souhaitez des pistes supplémentaires, sachez que des applications sont disponibles à la demande sur l'enchaînement suivant le premier kiai et le saut. Nous interviendrons avec plaisir pour vous les proposer.

Maître Hirokazu Kanazawa 

Frédéric Namèche 

Petite fille du Japon 

 Luca Valdesi